C’est une sauvageonne qui n’a pas eu d’autre choix que celui de venir taper à notre porte parce qu’elle était en mauvaise posture. C’est une vagabonde qui a repris la route hier, vendredi, en fin d’après-midi après une seule nuit dans un vrai lit. Sa vie, c’est dans la nature. Elle a une relation incroyable avec les animaux ! Les siens lui font une confiance aveugle.
Jeudi 2 novembre, tandis que la pluie tombe sans discontinuer, nous entendons aboyer un chien … que nous n’avons pas ! Aussitôt suivi par la vision de 2 molosses devant nos fenêtres ! En nous approchant pour voir d’où ils viennent, nous découvrons avec stupeur que des chevaux montent l’allée ! Des chevaux de traits, massifs et puissants. Sur l’un d’eux, une jeune fille affublée d’une longue veste imperméable kaki qui ne cache pas ses cheveux collés par la pluie !
Nous nous avançons, yeux écarquillés. Elle descend de sa monture et abandonne ses 3 chevaux qui ne bougent pas d’un sabot pour nous expliquer tant bien que mal, tellement elle tremble de froid, qu’elle n’a plus aucun vêtements secs et qu’elle cherche un abri pour la nuit après avoir vu le panneau gîte au bas de notre allée. Un abri, pour elle et sa troupe.
Dans nos têtes, les pensées s’entrechoquent ! D’où vient-elle ? Que fait-elle en plein hiver à voyager de la sorte ? Où va-t-elle ? Peut-on accepter cet étrange équipage sans plus d’explications ? Et puis, enfin, on réagit. Parons au plus pressé, la mettre au chaud parce que vraiment, elle n’a pas l’air en forme !
Mais avant, elle tient à s’occuper de tous ses animaux. Nous mettons les chevaux avec les nôtres parce qu’elle nous assure que tout se passera bien. Effectivement, après quelques hennissements et des reniflades de part et d’autre, tout semble aller pour le mieux et les nouveaux venus se dirigent tout droit vers le râtelier à foin. Ils ont faim !
Pas question pour elle de laisser les chiens dehors bien qu’ils soient tout mouillés et de taille respectable. Nous décidons de les installer dans notre arrière-cuisine où Thierry déplie une vieille couverture et allume un feu dans le poêle à bois. Ils s’installent aussitôt. On sent qu’ils sont bien ! Et là, nous découvrons qu’il y a aussi un chat. Très jeune. Celui-là était à l’abri dans sa panière. Il se couche confortablement près du feu mais n’hésites pas à jouer quand on passe à côté. Il va très bien !
Pendant que Thierry est occupé avec la ménagerie, sans chercher à poser de questions parce qu’il est primordial qu’elle se réchauffe, je montre la salle de bain à l’inconnue frigorifiée, et la chambre attenante où elle pourra passer la nuit. Dans notre maison. Je lui pose des vêtements devant la porte. Elle ne cesse de remercier.
Quelques minutes après, elle descend, vêtue chaudement, emmitouflée dans une veste épaisse. On lui propose de goûter – elle ne doit pas manger tous les jours à sa faim, elle dévore – et profitons de ce moment de calme pour en apprendre plus sur elle. Elle se prénomme Arrone ou Aaron (pas d’explication pour ces deux prénoms). Elle est bergère itinérante, arrive de Bordeaux et va vers Brive où elle est attendue pour veiller sur un troupeau de 600 brebis. Une lourde charge au moment des agnelages. Elle fait ce métier depuis 7 ans déjà … elle n’a que 24 ans !
Au cours des heures que nous avons passées ensemble, nous avons appris qu’elle était originaire de Paris ! Son métier l’a conduite en Suisse, en Allemagne, en Espagne et dans de nombreux coins de France. Elle en connaît un rayon sur le comportement des bêtes ! Elle a dressé des oiseaux pour les fauconniers, a perdu avec beaucoup de tristesse un cacatoès et un corbeau. Elle projette de partir en Mongolie avec son équipage mais devra d’abord travailler dur pour avoir les moyens de s’acheter une roulotte !
C’est une sauvageonne qui n’a pas eu d’autre choix que celui de venir taper à notre porte parce qu’elle était en mauvaise posture. C’est une vagabonde qui a repris la route hier, vendredi, en fin d’après-midi après une seule nuit dans un vrai lit. Sa vie, c’est dans la nature. Elle a une relation incroyable avec les animaux ! Les siens lui font une confiance aveugle.
Un photographe qui la suit depuis qu’elle a 17 ans, Ken Wong Youk Hong, est venu de Bordeaux pour immortaliser l’instant et donner de ses nouvelles à tous les fans qui la suivent sur sa page Facebook. Nous la suivrons nous aussi.
En attendant, si vous la voyez par temps mauvais, n’hésitez pas à leurs proposer le gîte et le couvert pour les requinquer. Ils n’ont pas forcément besoin d’une maison mais d’un toit simple sur la tête et de quelques vivres aussi. Et puis, même si pour vous c’est de la folie, ne soyez pas surpris si c’est la vie qu’elle a choisie !